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Vignette 4

14 juin 2019

LE PÈLERINAGE DE LUMIÈRE

Quand ses confrères shaykhís se rassemblèrent près de l’entrée de la mosquée pour l’écouter parler, ils remarquèrent que, bien que l’apparence de Mullá Husayn n’eût pas changée, il était sensiblement différent. Quand il parla, il avait une nouvelle flamme dans les yeux. Ces confrères n’avaient pas encore trouvé le Promis, mais ils ressentaient que Mullá Husayn le connaissait, même s’il refusa de le dire. Néanmoins, il recommanda à tous de jeûner et de prier à Dieu, et la réponse viendrait avec le temps.



Graduellement, comme l’avait prédit le Báb, presque tous ceux qui devinrent les Lettres du Vivant furent dirigé par des prières et des rêves vers la maison du Báb, y compris le neveu et le frère de Mullá Husayn. Le Báb dit ensuite à Mullá Husayn qu’il restait une autre Lettre du Vivant qui devait se présenter et qu’il arriverait le lendemain soir.

Le soir suivant, alors que le Báb et Mullá Husayn rentraient à la maison du Báb, ils rencontrèrent un jeune homme agité dont les vêtements étaient couverts de la poussière du voyage. Celui-ci s’approcha de Mullá Husayn, l’embrassa et lui demanda s’il avait atteint son but, tout en fixant du regard le Báb. Surpris, Mullá Husayn l’invita à se calmer et lui dit qu’il lui laisserait savoir sous peu, mais le jeune homme ne détourna jamais son regard du Báb.

« Pourquoi cherchez-vous à me le cacher? Je puis le reconnaître à son allure. J'affirme avec confiance que personne à part lui, ni en Orient ni en Occident, ne peut prétendre être la Vérité. Personne d'autre ne peut manifester la puissance et la majesté qui émanent de sa sainte personne. »

« Ne soyez pas étonné de son étrange comportement, fit remarquer le Báb. Nous avons été en communion avec ce jeune homme dans le monde de l'esprit. Nous le connaissons déjà. Nous attendions en effet sa venue. Allez sur-le-champ l'inviter à me rejoindre. » Ce jeune homme, qui s’appelait Muhammad-‘Alí-Bárfurúsh mais qui était aussi connu sous le nom de Quddús, nom qui signifie « le plus saint », devint la dix-huitième Lettre du Vivant.

En octobre 1844, cinq mois après sa déclaration et le départ des Lettres du Vivant qui avaient pour mission de répandre la Foi bábíe, le Báb, son serviteur Mubárak et Quddús se préparèrent à quitter Búshihr pour leur pèlerinage à la Mecque et Médine – comme chaque musulman doit le faire au moins une fois durant sa vie – en Arabie, le pays de naissance du prophète Muhammad.

Ils prirent un bateau à destination de la ville portuaire arabe de Djedda, mais les voyages par mer à l’époque étaient très difficiles : les aménagements étaient inconfortables, la nourriture était désagréable et l’eau était rare. Les eaux du golfe Persique furent particulièrement agitées durant ce voyage; le bateau précaire avec ses passagers fut ballotté sur les vagues par la tempête comme un jouet pour enfant. Bien que de nombreux passagers, dont la plupart étaient des pèlerins, se blottirent au fond du bateau par peur devant cette nature en colère et se disputèrent entre eux, il en fut tout autrement pour le Báb et ses compagnons. On les vit assis l’un près de l’autre, avec un calme imperturbable, sur le pont principal, où le Báb était occupé à prier et à dicter des tablettes à Quddús qui transcrivait ses paroles.

À leur arrive à Djedda, on trouva un chameau pour le Báb, mais Quddús refusa le chameau qu’on lui offrit, préférant marcher aux côtés du Báb en signe d’humilité et d’amour. Un jour, alors que le Báb s’arrêta à un puit pour offrir ses prières, un bédouin apparut soudainement, et se précipitant sur eux, saisit la sacoche du Báb qui contenait ses écrits et s’enfuit dans le désert. Mubárak se mit à le poursuivre, mais le Báb lui signala de rester.



« Si je t’avais laissé faire, tu l’aurais certainement rattrapé et puni. Mais il ne le fallait pas. Les papiers et les Écrits que contenait ce sac sont destinés à parvenir, par le truchement de cet Arabe, en des lieux que nous n’aurions jamais réussi à atteindre. Ne sois donc pas affligé de ce qu’il a fait car c’était le décret de Dieu, l’Ordonnateur, le Tout-Puissant. »

Le Báb et ses compagnons arrivèrent enfin à la Mecque, et selon l’ancienne coutume, à la Fête du sacrifice (Äid al-Adha), le Báb acheta 19 agneaux pour les sacrifier : neuf en son propre nom, sept pour Quddús et trois pour Mubárak. La viande fut ensuite distribuée aux nécessiteux et aux pauvres. Bien que le début du pèlerinage (connu sous le nom de hajj) coïncidât cette année-là avec le premier mois de l’hiver, la chaleur était si intense que de nombreux pèlerins enlevèrent leurs turbans et leurs manteaux pour marcher autour de la Kaaba. Cependant, le Báb refusa, en signe de déférence, de suivre leur exemple. Il marcha autour de la Kaaba entièrement vêtu et ne sembla aucunement gêné par le soleil impitoyable.sse et de l'incertitude qui oppressaient si lourdement son âme.

Le dernier jour du hajj, le Báb rencontra Mírzá Muḥíṭ-í-Kirmání, un disciple shaykhí lâche et ambitieux qui n’avait pas reconnu la station du Báb. Le Báb pris sa main et, plaçant son autre main sur la pierre noire sacrée de la Kaaba, s’adressa à lui en ces termes : « O Muḥíṭ! Vous vous considérez comme l'une des figures les plus marquantes de la communauté shaykhíe et comme un éminent interprète de ses enseignements. Dans votre cœur, vous prétendez même être l'un des successeurs directs et l'un des héritiers légitimes de ces deux grandes Lumières, ces Etoiles qui ont annoncé l'aube de la direction divine. Regardez, nous sommes tous deux à présent debout à l'intérieur de ce mausolée très sacré […] En vérité, je le déclare, personne à part moi en ce jour, ni à l'Est ni à l'Ouest, ne peut prétendre être la Porte qui mène les hommes à la connaissance de Dieu. »

Il invita ensuite Mírzá Muḥíṭ de lui demander tout ce qu’il lui plaisait et promit de révéler des versets qui démontrerait la vérité de sa mission, refusant d’abandonner la main de Mírzá Muḥíṭ jusqu’à ce que celui-ci déclare clairement soit qu’il se soumettait sans réserve à sa cause ou la rejetait totalement. Cherchant à s’échapper, Mírzá Muḥíṭ tenta de flatter le Báb et lui soumit ses questions. Il lui dit ensuite qu’il le verrait à Médine, où se situait le tombeau du prophète Muhammad, pour recevoir les réponses promises. Cependant, Mírzá Muḥíṭ évita le Báb à Médine, et bien que le Báb lui avait écrit une tablette intitulée « L’Épitre entre les deux tombeaux », il refusa de reconnaître le Báb et son attitude envers la foi continua d’être marquée par une opposition.

Avant de partir pour Médine, le Báb révéla une tablette qu’il envoya au shérif de la Mecque, la plus importante autorité religieuse de la ville. Cet homme était si occupé avec son travail qu’il ne prit la peine de lire la tablette qu’après le départ du Báb et ne connut rien de l’auteur de celle-ci qu’après son martyre à Tabríz. Quand il lit enfin la tablette du Báb, la réprimande était claire :

O Shérif !... Ta vie durant, tu Nous as consacré ta dévotion mais, lorsque Nous Nous sommes manifesté à toi, tu as refusé de porter témoignage à Notre Souvenir et d'affirmer qu'Il est en fait le Très-Exalté, la Vérité souveraine, l'infiniment Glorieux. Ainsi, au jour de la résurrection, ton Seigneur t'a mis à l'épreuve. Il est en vérité, l'Omniscient, l'infiniment Sage. Si, au moment où Nous t'avons envoyé le Livre, tu avais dit: "Me voici", Nous t'aurions admis dans l'assemblée de ceux de Nos serviteurs qui croient sincèrement, et Nous t'aurions gracieusement loué dans Notre Livre jusqu'au jour où tout homme comparaîtra devant Nous pour le jugement […] Cependant, ce qui a été préordonné est advenu.

Après avoir visité Médine et prié ardemment aux tombeaux du prophète Muhammad et de Shaykh Aḥmad-i-Aḥsa’i, le fondateur de la foi shaykhíe, les trois hommes partirent pour Djedda et prirent un bateau à destination de Búshihr. Ils regagnèrent la Perse où tant le triomphe que les persécutions attendaient le Báb et ses disciples.


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